Les erreurs des monétaires sur les monnaies romaines

Frédéric Weber

Les monnaies antiques étaient frappées à la main, il n'est donc pas étonnant de retrouver parmis elles de nombreuses traces de fautes des ouvriers monétaires.

1) Les erreurs de gravure :

1) Les erreurs de type :

Parfois, le graveur se trompe dans l'interprétation d'un type et montre une différence avec le type normal. Dans l'exemple ci-dessous, sur un denier de Geta, la haste du prince de la jeunesse a été remplacée par un sceptre :


Sur ce second exemple, un antoninien de Philippe II, l'habituel globe tenu par le prince a été remplacé par un objet ressemblant à un parazonium :




2) Les erreurs de légende :

Il arrive également, souvent dans les ateliers orientaux, que les légendes comportent des fautes d'orthographes. Il est probable que la prononciation des mots n'étaient pas partout la même dans l'empire et que certaines légendes ont été écrites de manière phonétique. Parfois une lettre grecque remplace une lettre latine. Sur cet exemple, une lettre en remplace une autre : une sorte de H en minuscule remplace le E, donnant une légende SAECVLARhS AVG en lieu et place de la légende SAECVLARES AVG :



Sur cet autre exemple, un denier de Septime Sévère frappé à Emèse, le R de principi a été remplacé par un B. Ce type d'erreur est relativement commun sur les monnaies des ateliers orientaux.

Sur la monnaie ci-dessous, un "D" a été gravé par erreur, mais le celator s'en est rendu compte et l'a corrigé en "B" :


Dans d'autres cas, nous avons des fautes d'orthographes, comme sur cet antoninien de Trébonien Galle portant la légende SAECVLLVM NOVVM avec deux "L " à Saeculum :

 

Enfin, sur cet antoninien de Vabalathe et Aurélien, la légende VABALATHVS V C R IM DR sur la face montrant Vabalathe a été remplacée par la légende IMP C AVRELIANVS AVG :

 



3) Les gravures mal exécutées :

Parfois une gravure est mal exécutée, comme si le graveur ne savait pas trop bien ce qu'il devait graver ou qu'il avait été très imprécis. Sur ce denier de Macrin, la gravure du long caducée est si mal exécutée qu'il ressemble plus à la Tyrse de Dyonisos :

 

 

2) Les erreurs de frappe :


1) Les monnaies accidentellement incuses (Brockage) :

Lorsqu'une monnaie reste accrochée au coin, il arrive qu'un autre flan soit frappé alors que la monnaie est encore fixée à l'un des coins. Dans ce cas, la monnaie déjà frappée imprime la marque d'une de ses faces en creux sur l'autre monnaie. Ceci arrive plus fréquement avec une monnaie restée sur le coin mobile ou coin de revers, dans ce cas l'avers est marqué en creux sur la nouvelle monnaie :

Denier d'Othon (Tkalec AG)



Les incuses présentant deux revers sont beaucoup plus rares :



Parfois, la monnaie accidentellement incuse a été refrappée imédiatement, ce qui laisse parfois des traces sur la face ayant été frappée précédemment en creux. nous pouvons voir sur cet antoninien de Postume, au revers, la trace du visage en creux de l'empereur surfrappé par le revers à la galère :



2) Le trefflage (Double struck) :

Cet "accident" arrive lorsque la monnaie ou plus fréquement le coin mobile a légerement bougé entre deux coup de marteau. Dans ce cas, la légende ou d'autre détails sont imprimés deux fois :



Sur ce second exemple, la monnaie a légerement bougé sur le coin dormant (avers) et le coin de revers a été positionné différement :



Sur ce 3e exemple, le coin de revers a fait une rotation de 180° :

 

2.1) Double frappe avec deux revers :

Enfin sur cet autre exemple, la monnaie présente une erreur très intéressante. Le revers a été frappé deux fois alors que la monnaie était encore dans le coin d'avers, comme pour les autres monnaies trefflées, mais dans le cas de cet exemplaire, le coin de revers a été changé entre deux frappes, ainsi, le bas du revers nous montre la trace du type MONETA AVG et le haut nous montre PAX AVG sur-imprimé sur le premier type :

Colin Kraay exposa verbalement, au début des années 70, sa théorie à Curtis Clay concernant ces erreurs. Il semblerait que deux coins de revers étaient utilisées alternativement à un rythme rapide. La double frappe arriverait quand une monnaie déjà frappée resterait par erreur dans le coin d'enclume et seraient refrappée avec le second coin de revers. Cette frappe à deux coins de revers utilisés alternativement avait probablement pour but de préserver les coins de revers en les empèchant de surchauffer. Elle était peut être également un moyen d'accélérer la cadence de production. Ce type d'erreur apparait plus fréquement sur les grands bronzes.

(Collection Frederic Weber)

Superposition à 180° de deux coins de revers : RIC 663 (VICTORIA AVG / SPQR) et RIC 660 (VENER VICTRIX ou VENERI VICTRICI) ou RIC 661 (VENVS AVG)

 

(Geminy LLC)

Superposition à 180° de deux coins de revers : AEQVITAS AVG et P M TR P II COS P P

 



3) Les cassures de coins :

Lors d'une cassure de coin, les monnaies présentent en relief les traces de la cassure :

(Collection Icos, ex Collection Frederic Weber)




4) Les monnaies accidentellement unifaces :

Il s'agit d'une rare erreur résultant probablement de la juxtaposition de plusieurs flans vierges au moment de la frappe.

 

 



5) Coin défectueux :

Cet accident résulte probablement d'un défaut important du coin ayant entrainé une fragmentation de sa surface au centre. Leu émet l'hypothèse pour cette monnaie que le coin devait contenir une bulle d'air importante qui a entrainé la destruction du centre du coin sous les importants coups de marteau. Je pense cependant qu'ici, il s'agit d'une surfrappe sur monnaie incuse.

 

7) Les coins bouchés :

Il arrive que certains détails gravés en creux sur le coins soient bouchés par des morceaux de métal provenant des monnaies frappées. Dans ce cas, le détail bouché sur le coin disparait des monnaies frappées. Sur cet exemple le second "C" de la légende CONCORDIA a été bouché :

(Collection privée)



7) Autres erreurs improbables :

Cette erreur est difficile à interpréter, la monnaie présente un avers normal et un revers incus :

Je me suis longuement interrogé sur cette erreur :

Pour y répondre, je vous propose un petit texte romancé, nous plongeant dans une minute de la vie d'un monétaire :


"Depuis plusieurs heures, il placait le coin de revers sur les flans rougis au feu qu'un autre ouvrier plaçait sur le coin d'avers avec ses tenailles, soudain, une monnaie resta accroché au coin qu'il tenait dans la main. Pendant ce temps là, son collègue avait déjà placé un flan chauffé sur le coin d'enclume. Au moment où il approchait le coin du nouveau flan à frapper, la monnaie se détacha du coin, elle fit un rebond sur l'enclume, se retourna et se retrouva pile-poil au dessus du flan prêt à frapper.

Pas question pour lui de retirer la monnaie encore chaude du flan brûlant, d'autant que l'abrutit qui tenait le marteau, un esclave Thrace aux muscles d'Hercule, mais à la cervelle de caille aurait été capable de lui écrasser la main dun coup de marteau automatique. Tous étaient abrutis par les conditions de travail, la cadence infernale qui demandait, en pleine inflation galoppante, de frapper toujours plus de monnaies en un laps de temps toujous plus court. Tous effectuaient les gestes nécessaire à la frappe des monnaies sans même y penser."

Pas question non plus de demander à l'ouvrier aux tenailles de retirer la monnaie retournée sur le flan, celà aurait ralentit le rythme de la chaine. Il plaça donc son coin au dessus du flan et de la monnaie supperposés, et le Thrace abatit fermement sa masse, écrasant le flan et la monnaie l'une contre l'autre."

Dans cette histoire, le flan est la monnaie illustrée ci-dessus. l'autre monnaie aurait été intéressante aussi à retrouver. L'accident de frappe permet de la décrire. Une de ses faces porte la trace d'une marque de revers au relief écrasés, l'autre face est un revers parfaitemant marqué.

8) Doubles avers / doubles revers :

Il existe de très rares monnaies frappées avec deux coins d'avers ou deux coins de revers comme sur cet exemple :

 

 

3) Les hybrides :

Nous appelons hybrides des monnaies frappées avec deux coins qui normalement n'étaient pas prévu pour être utilisés ensembles. Ce phénomène est relativement fréquent pour l'atelier de Rome dans la seconde moitier du IIIe siècle.

Nous pouvons diviser les hybrides en deux groupes :

1) Les hybrides contemporains (Hybrids) :

Ces hybrides indiquent un certain laxisme dans le contrôle des coins au sein d'un atelier monétaire ou d'une officine particulière.

Par exemple ce denier de Domitien est frappé avec un revers destiné à l'impératrice Domitia :

 

2) Les hybrides de coins d'époques différentes (Mules) :

Ces monnaies ont été frappées avec des coins d'époques différentes. Parfois, de nombreuses années se sont écoulées entre la gravure des deux coins monétaires utilisés pour frapper une même monnaie. Nous pouvons diviser ces hybrides en deux catégories :

a) Les coins de revers récupérés : Dans ce cas l'avers est plus récent que le revers, un ancien coin de revers a été réutilisé, montrant ainsi que les vieux coins n'étaient pas toujours détruits au début d'un nouveau règne. L'exemple ci-dessous montre un avers de Claude II associé à un revers de Gallien :

 

b) Les coins d'avers récupéres : Ce type d'erreur est beaucoup plus rare et il est étonnant que les anciens coins d'avers n'aient pas été détruits au début d'un nouveau règne et aient pu être réutilisés ensuite. Cependant, nous connaissons des exemples de tels hybrides. L'illustration ci-dessous nous montre une denier combinant un avers de Domitien et un revers de Trajan :

 

 

4) Les erreurs de flans :


1) Les Poids doubles :

Il arrive fréquement que certaines monnaies aient des poids anormalement élevés sans que nous puissions déterminer si c'est intentionnel ou non. Ceci est relativement fréquent pour les antoniniens de Billon du IIIe siècle dont le poids importait probablement assez peu. Le cas est netement plus rare pour les espèces en métaux précieux.

J'ai dans ma collection probablement l'un des deniers les plus lourds connus pour le IIIe siecle, son poids est presque le double de celui deniers normaux :


Il pèse 5g18 et son épaisseur est impressionnante. Il s'agit bien entendu d'une erreur dans le coulage des flans. J'avais pensé à deux flans collés l'un à l'autre, mais la tranche n'indique absolument pas que ça puisse être le cas. il est étonnant en tout cas que ce denier soit sortit de l'atelier et surtout porte des trace de circulation ! Pour information le référencements des deniers du British Museum pour Alexandre donne des poids allant de 1,89 à 4g45. Le poids moyen est de 2g98.


2) Les formes étranges :

Ce "denier" de Septime Sévère est un faux coulé :

(Photo Privée)



3) Les erreurs d'homogénéité de l'alliage :

Cet antoninien de Postume montre un alliage manquant complêtement d'homogénéité. L'aspect du métal est celui du cuivre pur par endroits alors que le reste de la surface montre que l'alliage est le classique billon monétaire :

 


Frédéric Weber, 2007

 

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